Le Tour de France, épreuve mythique, porte depuis ses débuts en 1903 une ombre : celle du dopage. Des premiers coureurs consommant alcool et éther aux scandales modernes impliquant l’EPO ou les transfusions sanguines, la question revient sans cesse : les cyclistes sont-ils dopés ?
En tant qu’observateur engagé dans l’analyse des pratiques sportives, je vous propose un décryptage basé sur des faits historiques, des données scientifiques et des témoignages marquants.
Histoire du dopage : Des potions magiques aux systèmes organisés
Les années 1970-1990 : Tricherie artisanale et aveux forcés
En 1978, Michel Pollentier remporte l’étape de l’Alpe d’Huez et endosse le maillot jaune. Mais lors du contrôle antidopage, les médecins découvrent un système de tubes dissimulés sous son maillot, reliés à une poche d’urine propre.

Cet épisode grotesque révèle une réalité : les coureurs trichent, aidés par des équipes complices.
Les années 1990-2000 : L’ère de la sophistication et de l’omerta
L’industrialisation du dopage
L’arrivée de l’EPO au début des années 1990 marque un tournant majeur. Cette hormone, initialement développée pour traiter l’anémie, devient rapidement le produit phare du peloton. Contrairement aux amphétamines et stéroïdes des décennies précédentes, l’EPO est indétectable par les contrôles de l’époque, ce qui encourage son utilisation massive.
Les équipes mettent en place des programmes sophistiqués, avec médecins spécialisés et matériel de pointe. Les coureurs ne sont plus livrés à eux-mêmes comme à l’époque de Pollentier et sa “poire” artisanale. Le dopage devient une science exacte, orchestrée par les staffs médicaux.
L’affaire Festina : la chute du mur du silence
Le 8 juillet 1998, l’arrestation de Willy Voet à la frontière franco-belge fait l’effet d’une bombe. Dans sa voiture, les douaniers découvrent un véritable arsenal pharmaceutique : EPO, hormones de croissance, amphétamines.
L’enquête révèle que l’équipe Festina a mis en place un système de dopage organisé où :
- Les médecins supervisent les protocoles.
- Les soigneurs transportent et administrent les produits.
- Les coureurs suivent des programmes personnalisés.
L’héritage d’une génération perdue
Cette période laisse des traces profondes dans le cyclisme :
- Effondrement de la confiance du public.
- Disparition de courses historiques.
- Désengagement des sponsors français.
- Rupture entre coureurs et médias.
Le scandale Festina marque paradoxalement le début d’une nouvelle ère : création de l’AMA, introduction du passeport biologique, renforcement des contrôles. Mais le mal est fait : une génération entière de champions voit son palmarès entaché par les soupçons et les aveux tardifs.
Richard Virenque, star de l’équipe, avoue finalement sous la pression : « Je me suis dopé à mon insu » – une formule devenue symbole du déni cycliste.
L’ère post-Armstrong : Une lutte plus sophistiquée
La révolution du passeport biologique
En 2008, l’UCI introduit le passeport biologique de l’athlète (ABP), marquant un tournant majeur dans la lutte antidopage6*. Cette approche indirecte permet de détecter les anomalies physiologiques sans nécessairement identifier les substances utilisées. La prévalence du dopage sanguin a considérablement diminué depuis son introduction.
Les nouveaux défis (2015-2025)
Le rapport de la Commission Indépendante de Réforme du Cyclisme (CIRC) en 2015 révèle que si la situation s’est améliorée, le dopage n’a pas totalement disparu. Les principales évolutions concernent :
- Le passage des substances interdites aux produits de la zone grise.
- L’utilisation de tramadol et de glucocorticoïdes.
- La baisse des coûts des produits dopants.
- L’implication continue de médecins peu scrupuleux.

Les stratégies modernes de lutte
L’approche multidimensionnelle
Le cyclisme moderne combine plusieurs méthodes de détection :
- Contrôles traditionnels.
- Suivi du passeport biologique.
- Collecte de renseignements.
- Approche forensique.
Les zones grises actuelles
En 2024-2025, l’attention se porte particulièrement sur les substances non interdites mais potentiellement performantes. L’UCI et l’AMA travaillent à :
- Réglementer l’usage des glucocorticoïdes.
- Interdire certaines substances comme le tramadol.
- Renforcer le suivi médical des athlètes.
L’héritage d’une génération
Le cyclisme a parcouru un long chemin depuis l’affaire Festina. Les mesures prises ont permis de :
- Réduire significativement la prévalence du dopage.
- Créer un environnement où les athlètes propres peuvent gagner.
- Développer des programmes éducatifs pour les jeunes coureurs.
Cependant, la vigilance reste de mise. La lutte antidopage continue d’évoluer pour s’adapter aux nouvelles formes de tricherie, dans un sport qui a appris de ses erreurs passées mais qui doit rester en alerte permanente.

Contrôles antidopage modernes : Une traque high-tech
L’ère de l’ITA et du passeport biologique
Depuis 2021, l’Agence Internationale de Test (ITA) gère les contrôles du Tour de France. En 2024, près de 600 échantillons (sang et urine) sont prélevés pendant la course, avec des tests ciblant :
- Les leaders (maillot jaune, vert, etc.).
- Les performances anormalement élevées.
- Les renseignements fournis par des lanceurs d’alerte.
Le passeport biologique (ABP) suit les variations sanguines des coureurs sur des années, détectant les anomalies suggérant un dopage. En 2024, un nouveau test détecte l’hormone de croissance (HGh), autrefois indécelable.

Des méthodes toujours contournées ?
Malgré ces avancées, des voix critiques subsistent. En 2023, des coureurs admettent utiliser le microdosage d’EPO en altitude, une pratique difficile à tracer. La rétroanalyse (tests sur échantillons conservés 10 ans) reste un outil clé, comme pour Lance Armstrong, déchu de ses 7 victoires en 2012 après des tests positifs rétroactifs.
Les chiffres qui interrogent
44 vainqueurs sur 56 impliqués dans des affaires de dopage
Une étude montre que 78% des vainqueurs du Tour depuis 1968 ont été liés à des scandales. Même les légendes comme Eddy Merckx (5 victoires) ont eu des contrôles positifs.

2024 : Seuls 2% des partants déjà condamnés
En 2024, seuls 3 coureurs sur 184 partants ont un passé de dopage avéré (ex. Simon Yates). Une amélioration ? Oui, mais prudence : l’histoire montre que les contrôles positifs surviennent souvent après la carrière.
Témoignages et dilemmes éthiques
Le cas Lance Armstrong : Un système sophistiqué

« Je ne me considérais pas comme un tricheur, mais comme un compétiteur », déclare Armstrong dans son aveu télévisé. Son équipe US Postal utilisait des transfusions sanguines et de l’EPO en évitant les contrôles grâce à des complicités internes. Un exemple criant de dopage organisé, mais aussi d’une culture où la victoire justifie tous les moyens.
Les coureurs propres existent-ils ?
« Si vous ne prenez rien, vous êtes un idiot », lançait Philippe Gaumont, ancien cycliste. Pourtant, des riders comme Steven de Jongh ont arrêté l’EPO dès 2001 par peur des contrôles. Preuve qu’une évolution est possible.
Conclusion : Un sport en quête de rédemption
Le Tour de France reste un laboratoire de l’antidopage. Entre progrès technologiques (tests ADN, biomarqueurs) et défis persistants (microdosages, dopage génétique), la lutte est un marathon. Les fans veulent croire en des héros propres, mais l’histoire enseigne la méfiance. Comme le résume un expert : « La tentation est éternelle, mais les traqueurs aussi ».
FAQ : Le Dopage dans le Tour de France
Qu’est-ce que l’EPO et pourquoi est-elle si utilisée dans le cyclisme ?
L’érythropoïétine (EPO) est une hormone qui stimule la production de globules rouges, augmentant ainsi le transport d’oxygène dans le sang. Les cyclistes l’utilisent pour améliorer leur endurance et leurs performances, particulièrement en montagne. Cette substance a dominé le dopage des années 1990, notamment dans l’affaire Festina.
Comment fonctionne le passeport biologique des athlètes ?
Le passeport biologique (ABP) est un outil de surveillance qui enregistre les marqueurs biologiques d’un coureur au fil du temps. Il permet de détecter des variations anormales suggérant un dopage, même sans trouver directement la substance dopante. Depuis 2021, l’ITA analyse environ 600 échantillons pendant le Tour.
Pourquoi le scandale Festina est-il si important dans l’histoire du Tour ?
Le scandale Festina en 1998 marque un tournant car il révèle pour la première fois l’existence d’un système de dopage organisé au sein d’une équipe professionnelle. La saisie de 500 doses d’EPO et les aveux de Richard Virenque ont forcé le cyclisme à affronter le problème du dopage institutionnalisé.
Quelles sont les nouvelles méthodes de dopage ?
Les pratiques modernes incluent le microdosage d’EPO en altitude, plus difficile à détecter, et potentiellement le dopage génétique. Les transfusions sanguines autologues restent également utilisées, comme l’a révélé l’affaire Armstrong.
Comment les contrôles antidopage ont-ils évolué ?
Les contrôles sont devenus plus sophistiqués avec l’introduction de tests pour l’hormone de croissance (HGh), la rétroanalyse des échantillons sur 10 ans, et le ciblage spécifique des leaders et des performances suspectes. L’ITA coordonne désormais tous les contrôles du Tour.
Le cyclisme est-il plus propre aujourd’hui ?
Les statistiques montrent une amélioration : en 2024, seulement 2% des coureurs ont un passé de dopage avéré, contre 78% des vainqueurs entre 1968 et les années 2000. Cependant, les experts restent prudents car les méthodes de dopage évoluent constamment.
Que risquent les coureurs pris pour dopage ?
Les sanctions peuvent inclure des suspensions de plusieurs années, le retrait des victoires et des prix, comme pour Lance Armstrong qui a perdu ses 7 victoires du Tour. Les équipes risquent également des sanctions financières et l’exclusion des compétitions.
Comment le Tour lutte-t-il contre le dopage aujourd’hui ?
Le Tour utilise une approche multi-facettes incluant des contrôles inopinés, le passeport biologique, la conservation long-terme des échantillons, et la collaboration avec les autorités policières. Les coureurs suspects font l’objet d’une surveillance accrue.
Existe-t-il encore des coureurs “propres” ?
Bien que certains coureurs comme Steven de Jongh affirment avoir arrêté le dopage, la question reste débattue. Les performances actuelles plus modestes et les contrôles renforcés suggèrent qu’il est possible de courir proprement, mais la vigilance reste nécessaire.
Comment les spectateurs peuvent-ils faire confiance aux performances actuelles ?
La transparence accrue, les contrôles plus stricts et les performances plus crédibles constituent des signes positifs. Cependant, l’histoire du Tour incite à maintenir un regard critique sur les performances exceptionnelles.

Qu’est-ce que le monoxyde de carbone et pourquoi est-il utilisé dans le cyclisme ?
Le monoxyde de carbone (CO) est utilisé via des recycleurs spéciaux pour mesurer le volume sanguin et la masse totale d’hémoglobine des coureurs. Certaines équipes l’utilisent également pour tenter de reproduire les effets de l’altitude et améliorer les performances7*.
Quelles équipes professionnelles ont reconnu utiliser le monoxyde de carbone ?
Trois équipes majeures ont admis utiliser des recycleurs de CO : UAE Team Emirates (équipe de Pogacar), Visma-Lease a Bike (équipe de Vingegaard) et Israel-Premier Tech.
Cette pratique est-elle considérée comme du dopage ?
Jusqu’à récemment, l’utilisation du CO n’était pas interdite par l’Agence Mondiale Antidopage. Cependant, l’UCI vient d’interdire l’inhalation répétée de monoxyde de carbone à partir du 10 février 2025.
Comment fonctionne le protocole d’utilisation ?
Les équipes utilisent un “recycleur de CO” qui permet de mesurer les valeurs sanguines. Certaines équipes pourraient suivre un protocole plus large incluant des “cures d’inhalations” avant les compétitions, suivies de séances d’oxygénothérapie hyperbare pour éliminer les résidu.
Quels sont les risques potentiels ?
Le monoxyde de carbone est un gaz potentiellement mortel. Même si les équipes affirment l’utiliser en petites quantités contrôlées, les risques pour la santé ont poussé l’UCI à interdire son usage hors cadre médical.

Quelle est la position des coureurs sur cette pratique ?
Jonas Vingegaard, double vainqueur du Tour, a réclamé l’interdiction de cette pratique malgré son utilisation par sa propre équipe. Il a déclaré “Je ne l’utiliserai plus jamais si l’UCI l’interdit”.
Comment l’UCI compte-t-elle contrôler cette pratique ?
L’UCI a interdit la possession de systèmes de re-breathing de CO en dehors d’une structure médicale. Cette interdiction entre en vigueur le 10 février 2025.
Quelle est la différence entre l’usage médical et le potentiel usage dopant ?
L’usage médical consiste en une seule inhalation pour mesurer les valeurs sanguines, tandis que l’usage dopant implique des inhalations répétées visant à améliorer les performances.
Pourquoi cette pratique est-elle controversée ?
Bien que présentée comme un outil de mesure, certains experts craignent que l’inhalation répétée de CO soit utilisée comme une forme de dopage déguisé pour améliorer les performances en augmentant la capacité de transport d’oxygène du sang.
Comment cette controverse a-t-elle émergé ?
La polémique est née pendant le Tour de France 2024 après la publication d’un article du média Escape Collective révélant l’utilisation de recycleurs de CO par plusieurs équipes majeures.
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